Sur l’importance de communiquer ouvertement avec son enfant.
L'annonce d'un diagnostic de cancer arrive souvent entre 21 et 55 ans, soit l’âge auquel on est le plus susceptible d’être responsable de jeunes enfants. Catapultée vers l’inconnu, la famille est traversée par une onde de choc qui l'oblige à s’adapter aux changements qui s’imposent. Le sentier est parsemé d’embuches et la nécessité de maintenir le cap tout en faisant face à l’incertitude n’est pas évident. Dès le départ, les défis sont nombreux pour la famille, et pour le/la patient.e qui doit :
Accueillir le diagnostic.
Faire l’annonce à son entourage.
Décider si il/elle accepte le plan de traitement proposé.
Vivre avec les effets secondaires liés aux traitements.
Remanier sa vie personnelle, professionnelle et sa vision du monde.
Découvrir un autre rapport à son corps.
Questionner son système de croyances.
Etc.
Au challenge que représente la parentalité, le cancer amorce un nouveau niveau de complexité. Assumer son rôle de parent en maintenant le bien-être et le développement de son enfant est rendu beaucoup plus difficile lorsque, en parallèle, on lutte pour retrouver la santé. Le cancer amplifie la peur de la séparation, de la perte et de la mort chez l'enfant, encore dépendant de la présence parentale. C'est ce qui invite certains parents à penser, dans un souci de protection, que celui-ci est trop jeune pour remarquer, comprendre ou s’adapter à la maladie. L'enfant est pourtant, à la manière d’une éponge, capable d’absorber tout ce qui circule autour de lui : peurs, craintes, non-dits, etc. Il reste ainsi sensible à l’ambiance familiale et aux changements amorcés dès l’annonce du diagnostic, même lorsque ce dernier ne lui a pas été communiqué.
Le corps tombe malade et c'est toute la famille qui bascule.
L'enfant n'a pas accès, comme c'est le cas chez l'adulte, à une capacité de nommer précisément ce qui lui arrive. Il s'exprime davantage par ses comportements et au travers de son corps. Le diagnostic du cancer chez son parent peut l'amener à vivre de grandes émotions qui peuvent s'exprimer, à sa manière, dans différentes sphères de sa vie :
Vie relationnelle : difficultés scolaires ou sportives, recherche de proximité, retrait social, augmentations des conflits, etc.
Vie psychique : niveau élevé d’anxiété, diminution de son estime de soi, difficultés de concentration, etc.
Vie émotionnelle : affects dépressifs, grande sensibilité, agressivité, frustration, etc.
Vécu corporel : maux de tête, mal au ventre, difficultés de sommeil, changement d’appétit, turbulence, hyperactivité, etc.
Face à ces changements, une bonne communication avec l’enfant joue un rôle essentiel. Véritable facteur de protection, elle lui permet de vivre plus sereinement cette période de grand chamboulement. En tant que parent, il arrive souvent de ne pas savoir comment annoncer la maladie à son enfant, de ne pas savoir quoi dire ou comment le dire, d’être pris dans un compromis entre être ouvert.e et le sauvegarder de la vérité. Il a été démontré que choisir de communiquer ouvertement lui permet de s’adapter plus facilement. En ouvrant la discussion et en répondant à ses questions et à son besoin d’informations, le sentiment de confiance est entretenu et sa détresse s’apaise.
Préparer l’enfant à l’annonce et lui offrir des informations adéquates sont des facteurs importants d'une bonne communication. On lui donnera ainsi des informations :
Adaptées à son âge : Les informations sont transmises de manière à être adaptées au niveau de développement cognitif et social de l’enfant.
Réalistes : Les mots justes sont utilisés et les informations ne sont pas déguisées sous des métaphores pour éviter d’avoir à les prononcer.
Suffisantes : Les informations données sont suffisantes pour que l’enfant puisse se représenter la situation de manière réaliste. Les détails inutiles pouvant créer de la détresse ne sont pas nécessaires.
Autre élément important d'une bonne communication : permettre une circulation émotionnelle suffisante. Le parent montre à son enfant que ses émotions seront accueillies en partageant avec lui ce qu'il ressent. Servant d'exemple pour l'enfant, celui-ci ose exprimer son vécu. Cet échange émotionnel crée un espace pour aborder des questions qui ne se limitent pas aux informations médicales et factuelles.
Le cancer est comme la « chute d'une pierre dans un étang. La maladie crée un effet d'entraînement qui modifie l'identité de base de la famille et crée une foule de défis qui découlent de ce nouveau point » Northouse & Peters-Golden, 1993.
Que l'on soit enfant, adolescent.e ou adulte, être averti.e de ce qui arrive à notre famille est ressenti comme un véritable besoin. Moins il y a de non-dits, de brouillard ou de sous-entendus autour du vécu de la famille, moins les scénarios catastrophes trouvent une place pour s'immiscer dans l'imaginaire. Avec des informations concrètes, claires et compréhensibles, l’enfant se sent inclus dans le processus et entouré par ceux qui l’aiment, ce qui est à la fois réconfortant et rassurant. Dès lors, si la maladie est telle la chute d’une pierre dans l’eau provoquant une onde de choc, elle peut aussi être la source d’un renouveau en découvrant une nouvelle manière de communiquer les un.e.s avec les autres et en renforçant les liens au sein de la famille.
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